Approches opérationnelles

Quelles pratiques de pêche pour limiter la déprédation?

D’après notre compréhension actuelle du problème de la déprédation, les meilleures pratiques de pêche pour réduire la déprédation sont de recommander aux pêcheurs d’utiliser des lignes courtes pour réduire le temps de virage lorsqu’ils sont confrontés à la déprédation. Il est également recommandé que les pêcheurs récupèrent toutes les lignes dans une zone de pêche à grande vitesse et se déplacent vers un nouveau lieu de pêche à au moins 100 km de distance.

Pêcher silencieusement

Nos travaux en acoustique révèlent que certaines manoeuvres des navires, comme des changements brutaux de régime (passer de la marche avant à la marche arrière) génèrent des bruits extrêments puissants pouvant se propager juqu’à une centaine de kilomètres, signalant leur présence aux mammifères marins. Il est essentiel d’opérer le plus silencieusement possible. A titre de comparaison, une opération normale de remontée des lignes est détectable par les orques dans un rayon maximun de 100 km. La manière dont le bateau est piloté a un fort impact sur la probabilité d’interaction et de déprédation. Nous avons remarqué des différences très importantes entre les capitaines de pêche opérant sur un même bateau.

Saison de pêche

Nos études du taux de déprédation au fil des saisons montre un fort effet de la saisonalité sur les interaction entre les navires et les cachalots. En effet, en hiver un grande partie des cachalots,  (exclusivement des mâles) quittent les ZEE pour aller se reproduire en zone tropicale. Par ailleurs, pour les orques, nos travaux ont montré que les unités sociales stoppaient leurs interactions en octobre et novembre. Cette période correspond à la reproduction des éléphants de mer et les orques se rapprochent des côtes de Crozet pour les chasser, délaissant les légines.
Mais
La pêche dans cette zone en hiver expose les pêcheurs à des conditions de travail extrêmement difficiles.

Article Saisonnalité

Stratégie de remontée de ligne en présence d’orques

Lors d’une session de pêche, plusieurs lignes sont mises à l’eau. Si les orques sont présentes au moment du virage, il est recommandé d’aller virer la ligne la plus éloignée de celle qui est affectée par la déprédation avant de revenir relever les lignes qui jouxtaient la ligne déprédatée.
Mais
Ce procédé augmente les distances parcourues ( la quantité de fioul), le temps passé à se déplacer et diminue la rentabilité de l’activité de pêche. Le surcout lié à cette stratégie est-il compensé par une moindre déprédation ?
Cette question reste posée.

Augmenter la vitesse de virage

L’augmentation de la vitesse de virage réduit considérablement le temps dont disposent les orques pour retirer et manipuler une grande quantité de légines des hameçons.
Mais
Cette pratique exige des pêcheurs qu’ils augmentent considérablement leur rythme de travail à bord, avec une augmentation des taux de découpe et d’éviscération des poissons, ce qui pose des problèmes de fatigue et donc de sécurité. De plus des vitesses trop élévées des lignes provoquent un décrochement des poissons pendant la remontée.

Quitter la zone de déprédation

Nous avons constaté que les orques suivent activement les navires lorsqu’ils se déplacent d’un lieu de pêche à un autre.
D’après nos résultats, les orques perdent le contact avec le navire au-delà d’une certaine distance.
Quand les orques sont présentes autour du bateau lors d’une session de pêche, la recommandation est de se déplacer d’au moins 70 km, avant de commencer une nouvelle session. En effet, on estime qu’en moyenne, les orques ne retrouvent les navires à de telles distances qu’après 3/4 jours.

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Des palangres plus courtes

On a constaté que les lignes courtes (5 km) limitaient les pertes causées par la déprédation dans les cas où les orques ne sont pas présentes au début de la pêche.
Mais
Si les orques sont déjà présentes, la déprédation restera élevée tout au long de la pêche, indépendamment de la longueur de la palangre.

Augmenter le nombre de navires opérant simultanément dans la ZEE de Crozet

La zone de Crozet a un nombre limité d’orques déprédateurs.
Celles-ci ont tendance à rester avec un navire une fois qu’elles l’ont atteint. Un nombre accru de navires dans la zone est susceptible de créer un effet de « dilution » sur la probabilité d’un navire d’interagir avec des orques, en réduisant le nombre d’orques disponibles pour la déprédation.
Mais
Recommander à la flotte d’opérer simultanément ne fonctionne pas, car cela peut augmenter la probabilité que les orques trouvent un navire de pêche avec lequel interagir. La déprédation totale serait d’autant plus élevée.